LES CINQ SENS : 4/L'OUIE
Je zappais sans but, quand j’ai vu Sheila et Ringo sur France 3 qui laissaient Les gondoles à Venise et le printemps sur la Tamise. Sheila portait une robe longue rose bonbon, et Ringo, un superbe combipantalon vert bouteille. J’ai pensé que ce serait parfait pour ma cuisine. Je veux dire, utiliser du rose pour peindre le carrelage mural, les murs étant verts. Un peu comme le saumon à l’oseille des Troisgros, pour rester dans les références vintage.
Absorbée dans mes réflexions chromatiques, je suis restée scotchée sur cette émission, censée évoquer les années Salut Les Copains, mais qui était en fait une compil’ des émissions des Carpentier. En entendant les Rubettes susurrer Sugar Baby Love, j’ai pensé à ma copine Sophie. L’après-midi, nous avions évoqué des groupes à la con des années 70. Ceux qui passaient à la télé et à la radio. Mais nous avions oublié les Rubettes. Du coup, je lui ai envoyé un texto pour qu’elle se branche sur la 3. Et on a passé une heure à se faire des commentaires par SMS sur la coiffure de C. Jérôme, la tronche de Joe Dassin (« On dirait un boucher charcutier », écrivait-elle. « Il est surtout bouffi par la coke », lui répondais-je), les dents de Sylvie Vartan, le destin tragique de David Carradine (« Il est mort les couilles accrochées au placard », selon ma copine).
C’était marrant et… réconfortant. Comment vous expliquer ? Parmi mes amis et collègues, il n’y a guère de rejetons des « classes populaires », comme disait Georges. La télé des Carpentier ou de Guy Lux, la variétoche, ça leur parle pas au niveau de leur vécu. Moi, je connais tous ces trucs PAR CŒUR. Les chansons de Dave (« Vanina, rappelle-toi que je ne suis rien sans toi, ah, ah »), ou de Sardou (« Le rire du sergent, la folle du régiment, la préférée du capitaine des dragons… »). Et je peux en déconner avec personne. Sauf avec Soph’…
Ça m’a fait du bien de replonger dans la mélasse musicale de mes années d’enfance et, surtout, dans le souvenir des soirées familiales sur le canapé en faux cuir, devant le poste en noir et blanc.