LE BLUES DES FEUILLES MORTES
Ainsi va la vie. Dans le jardin, le pommier perd ses feuilles. Demain, je quitte ma maison (j'ai déménagé "par anticipation" aujourd'hui, mais je signe demain l'acte d'achat d'un appartement). Avec un pincement au cœur, malgré tout. Mon ex, lui, vire ses affaires la semaine prochaine. Je sais qu'il va terriblement souffrir de la perte de cette maison. Car il n'a pas choisi. Alors que moi, j'ai ardemment désiré changé de lieu de vie et de vie tout court. J'étouffais ici…
Et pourtant, j'ai du vague à l'âme. Petite maison pleine de charme dans une banlieue pourrie, contre appartement sans âme dans un centre-ville avenant. Vie à quatre pendant quelques années, contre vie à trois pour une durée indéterminée. Oui, du vague à l'âme…
La vie est dure, non ? J'en parlais avec mon amie Delphine, avant-hier, devant une pizza. C'est fou comme les bonnes pizzas peuvent rendre mélancoliques. La mienne était au jambon de parme et à la roquette (oui, j'ai arrêté mon régime… Mais, je prends plus de tiramisu après la pizza.)
On s'en prend quand même plein la tronche, globalement. On souffre ou on voit souffrir, impuissants, des gens qu'on aime. Certains disparaissent, laissant des béances définitives.
Il y a aussi le boulot qui, de plus en plus, nous file de grandes tartes dans la gueule. Prends ça, et remercie ton patron de te donner du travail !
Et, plus généralement, l'âpreté des rapports humains, surtout dans une ville comme Paris.
Quel pourcentage d'individus a une vie sentimentale épanouie ? 50% ? Ou 10% ? Dans tous les cas, je fais partie des 50% ou des 90% restants… (en même temps, je suis pas encore morte, non plus). Et les nouvelles du monde ? Elles sont réjouissantes, les nouvelles du monde ? Alors quoi ? Qu'est-ce qu'il reste ? Les enfants, ok. Mais bon, les enfants, c'est important, mais c'est pas toute la vie. Et d'ailleurs, ça serait pas un bien pour eux qu'ils soient toute notre vie. T'imagines le fardeau !
Les enfants, justement. On les borde de partout. On les protège des petites et grandes misères. Et on culpabilise quand on prend un but (c'est une métaphore pas très heureuse, mais je suis sous influence de l'alcool ; c'est bien la première fois que j'écris un billet après avoir bu une vodka-jus d'ananas. D'ailleurs, même moi, je vois pas ce que j'ai voulu dire…). Heureux temps de l'insouciance, dit-on. Mais est-ce une si bonne idée de les préserver de la sorte ?
Perso, si j'avais su la merde que c'était, la vie d'adulte, j'aurais pas grandi. Je serais restée en primaire, quand j'étais première de la classe et que je découvrais la mer, à Canet-Plage, dans une béate sidération.